Indigenes de la République 37

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Non-Anniversaires

vendredi 3 mars 2006, par Hafiline

Où Lewis Carroll, - appelons le le divin diacre -, maître incontesté de la mesure du temps, nous suggère une salutaire leçon de civisme.

Pour Flor, Sylviane (c’est l’année de la femme !) André, Christophe et les autres

Alice rencontre bien des personnages dans ses périples au Pays des Merveilles ou Derrière le Miroir, en particulier celui qui ne veut pas qu’on fête son anniversaire, mais bien ses non-anniversaires tous les jours de l’année sauf un.

Dans notre monde réel - encore faudrait-il s’entendre sur ce qu’est le monde réel, les mystiques, les philosophes, les savants, les poètes (ces voyants) nous en proposent des définitions arrachées à leurs efforts pour l’explorer - dans notre monde réel dis-je, je crois qu’il serait bon d’appliquer cette règle du non-anniversaire à toutes ces commémorations qui nous invitent à nous rappeler, ponctuellement, que le monde est parsemé de problèmes et de dangers.

Il y a l’année de la femme, l’année de l’enfant, la journée mondiale du sida, le jour où il faut penser à tous ceux du quart monde avec ATD Quart Monde (encore qu’il faudrait qu’on se fasse des idées plus précises sur la nature de la misère qui prend, dans ses métamorphoses, pleins de formes et peut se débusquer aussi bien chez les plus nantis que chez les plus démunis), la journée de ci, la journée de ça, plus récemment la journée proposée pourla commémoration de la fin de l’esclavage (voir notre lettre à Monsieur Jacques CHIRAC) à la fin desquelles, obole donnée, on peut s’endormir, repus, au fond du lit ou devant quelques scories de la télévision.

Il serait temps de faire une grande manifestation au profit des non-anniversaires :

 qu’on se souvienne, tous les jours sauf un, que les femmes subissent dans le même temps des violences insupportables.

qu’on se souvienne, tous les jours sauf un, que des enfants sont exploités ou martyrisés . qu’on se souvienne, tous les jours sauf un, que des hommes sont massacrés au nom du profit, ou d’une race problématique.

qu’on se souvienne, tous les jours sauf un, que nous vivons dans un monde incertain, que nous sommes objets de ce monde avant d’en être de frêles sujets, au même titre que la fleur dans le jardin ou l’uranium dans son antre, et qu’il serait grand temps d’en prendre une conscience durable . Rejoindre les associations, les collectifs en place qui naissent et agissent à l’écart de ces journées et années prétendument ou réellement mémorables, semble un timide pas vers l’émergence d’un contre-pouvoir éradicateur, enfin de la bonne conscience et de la charité.

Et quand nous nous reposerons de cette remise en cause de tous les jours sauf un, pendant ce un, il nous sera permis de sommeiller, de rêvasser, de nous suicider peut-être, enfin de créer de la réalité à insuffler de force, le lendemain, à des réflexions et des luttes vitales.

Hafiline.


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